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Sanction et licenciements disciplinaires dans le secteur privé

Présentation webinaires 17 et 26 octobre 23

 

PROCEDURES, CONTESTATION et REGIME JURIDIQUE DE LA
PREUVE

PRESCRIPTION DES POURSUITES DISCIPLINAIRES

Principe : Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement
de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à
compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce
fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales.
(Art. L. 1332-4 du code du travail)
– Connaissance précise des faits par l’employeur ou son représentant
(hiérarchie du salarié)
– À condition d’avoir été engagées avant l’expiration du délai de
prescription, des poursuites pénales, et non une simple enquête pénale
préliminaire, interrompent ce délai jusqu’à la décision définitive de la
juridiction répressive si l’employeur est partie à la procédure pénale et,
dans le cas contraire, jusqu’au jour où il est informé de l’issue définitive
de cette dernière
– Caractère non obligatoire : l’employeur n’a pas à attendre l’issue de la
procédure pénale pour notifier le licenciement
MESURES PROVISOIRES A EFFET IMMEDIAT
– Mise à pied à titre conservatoire
– Mutation à titre conservatoire notamment dans l’attente d’une
décision pénale définitive ou de l’avis d’un conseil de discipline
Sauf en cas de poursuites pénales, cette mesure conservatoire, distincte
de la mise à pied disciplinaire, doit être suivie immédiatement de
l’ouverture de la procédure disciplinaire
– Sa notification interrompt la prescription des faits fautifs.
– Seul le licenciement fondé sur une faute grave ou lourde dispense
l’employeur du paiement du salaire afférent à cette période non
travaillée
– Si elle n’est pas suivie immédiatement de l’engagement d’une
procédure disciplinaire ou de licenciement, la décision s’analyse en
une mise à pied disciplinaire (ex: convocation à l’entretien préalable
intervenant plus de 7 jours après la mise à pied conservatoire)

PROCEDURE DISCIPLINAIRE
Principe : Lorsque l’employeur envisage de prendre une sanction, il
convoque le salarié en lui précisant l’objet de la convocation, sauf si la
sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même
nature (Art. L. 1332-2 du code du travail)
Le salarié peut se faire assister par une personne de son choix
appartenant au personnel de l’entreprise.
Au cours de l’entretien, l’employeur indique le motif de la sanction
envisagée et recueille les explications du salarié.
La lettre de convocation indique l’objet de l’entretien entre le salarié
et l’employeur c’est à dire son caractère disciplinaire mais n’a pas à
préciser les griefs reprochés au salarié. Elle doit rappeler que le salarié
peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au
personnel de l’entreprise.
Elle est soit remise contre récépissé, soit adressée par lettre
recommandée

CHOIX DE LA SANCTION / INCIDENCE DU REGLEMENT
INTERIEUR
Selon l’article L 1321-1 du Code du travail, le règlement intérieur fixe «
la nature et l’échelle des sanctions que peut prendre
l’employeur »
Une sanction ne peut être prononcée que si elle est prévue par le
règlement intérieur.
En l’absence de dispositions restrictives du règlement intérieur,
l’employeur peut prononcer toute sanction sous la seule réserve du
contrôle de l’autorité judiciaire.
Cette règle ne concerne pas le licenciement, le droit pour l’employeur
de licencier étant une prérogative prévue par la loi ( art. L 1231-1 du
code du travail).

PRINCIPES GENERAUX DU CONTROLE JURIDICTIONNEL
En cas de litige, le conseil de prud’hommes apprécie la régularité de la
procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à
justifier une sanction.
L’employeur fournit au conseil de prud’hommes les éléments retenus
pour prendre la sanction.
Au vu de ces éléments fournis par le salarié et l’employeur, le conseil
de prud’hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de
besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Si un doute subsiste, il profite au salarié.
Le conseil de prud’hommes peut annuler une sanction irrégulière en la
forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise. De même
lorsque la sanction est illicite (ex : sanction motivée par des
considérations discriminatoires)
Exercice abusif du pouvoir disciplinaire (détournement de pouvoir) ou
sanction vexatoire/attentatoire aux droits et libertés : le juge peut
allouer des dommages- intérêts au salarié

PROCEDURE DE LICENCIEMENT
Entretien préalable
L’employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant
toute décision, à un entretien préalable par lettre recommandée ou par
lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique
l’objet de la convocation mais n’a pas à préciser les griefs. (Art. L. 1232-
2)
L’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables
après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main
propre de la lettre de convocation.
Au cours de l’entretien préalable, l’employeur indique les motifs de la
décision envisagée et recueille les explications du salarié. (Art. L. 1232-
3)
Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne
de son choix appartenant au personnel de l’entreprise.
Lorsqu’il n’y a pas d’institutions représentatives du personnel dans
l’entreprise, le salarié peut se faire assister soit par une personne de son
choix appartenant au personnel de l’entreprise, soit par un conseiller
du salarié choisi sur une liste dressée par l’autorité administrative. La
lettre de convocation à l’entretien préalable adressée au salarié
mentionne la possibilité de recourir à un conseiller du salarié et précise
l’adresse des services dans lesquels la liste de ces conseillers est tenue à
sa disposition. (Art. L. 1232-4 )
L’entretien doit se dérouler en présentiel : pas d’entretien téléphonique
ni visioconférence
Le salarié dont le licenciement est envisagé n’est pas tenu de se rendre
à l’entretien préalable. Celui-ci étant prévu dans son seul intérêt, son
absence ne peut pas lui être reprochée par l’employeur
La présence d’un tiers à la société lors de l’entretien préalable rend la
procédure irrégulière. Est considéré comme tel un huissier ou l’avocat
de l’employeur.

NOTIFICATION DU LICENCIEMENT
Notification par lettre recommandée avec avis de réception. (Admission
d’autres modes de notification dès lors qu’ils permettent de justifier de
la date d’envoi et de réception du courrier par le salarié. Ex :la lettre
remise en main propre contre décharge ou notification par un
huissier)
Elle ne peut être expédiée moins de deux jours ouvrables après la date
de l’entretien préalable
Le contenu de la lettre de licenciements fixe les limites du litige en cas
de contentieux
Cette lettre doit comporter l’énoncé du ou des motifs invoqués par
l’employeur.
Elle peut exposer plusieurs motifs procédant de faits distincts.
La lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis, c’est-à-
dire matériellement vérifiables
Les motifs énoncés dans la lettre de rupture peuvent être précisés par
l’employeur à son initiative dans les 15 jours suivant la notification du
licenciement par lettre recommandée avec avis de réception ou remise
contre récépissé. De son côté, le salarié peut demander, dans ce même
délai et ces mêmes formes, des précisions sur ces motifs. L’employeur
dispose alors de 15 jours après la réception de cette demande pour les
lui communiquer dans les mêmes formes et délai, s’il le souhaite
Un licenciement, même irrégulier, entraîne la rupture du contrat de
travail.
La date de la rupture se situe au jour où l’employeur envoie la lettre de
licenciement. Le licenciement ne peut pas avoir d’effet rétroactif.
Dès l’instant où le licenciement est notifié, l’employeur ne peut le
rétracter qu’avec l’accord du salarié.
La date de présentation de la lettre recommandée notifiant le
licenciement constitue le point de départ du préavis. Si cette lettre est
remise en main propre contre décharge, ce point de départ est celui de
la remise.

CONTESTATION DU LICENCIEMENT
Délai pour agir : L’action individuelle du salarié en contestation de la
rupture de son contrat de travail se prescrit par 12 mois
Ce délai peut être suspendu si le salarié est dans l’impossibilité d’agir
(ex : hospitalisation en raison de troubles anxio-dépressifs Cass Soc 25
janvier 2023 n°21-17791).
Le délai court à compter de la notification du licenciement.
Les juges du fond ont l’obligation d’examiner l’ensemble des griefs
invoqués dans la lettre de licenciement.
La circonstance que le grief, énoncé par la lettre de licenciement, n’a
pas été indiqué au salarié par l’employeur au cours de l’entretien
préalable caractérise une irrégularité de forme qui n’empêche pas le
juge de décider que ce grief peut constituer une cause réelle et sérieuse
du licenciement.
En cas de pluralité de motifs de licenciement, si l’un des griefs
reprochés au salarié porte atteinte à une liberté fondamentale, le
licenciement encourt la nullité. La nullité encourue ne dispense pas le
juge d’examiner l’ensemble des griefs énoncés, pour en tenir compte, le
cas échéant, dans l’évaluation de l’indemnité à allouer au salarié (L
1235-2-1 du code du travail)

REGIME JURIDIQUE DE LA PREUVE
PRINCIPES PROBATOIRES
Principe : le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la
procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par
l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les
parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures
d’instruction qu’il estime utiles.
(…) Si un doute subsiste, il profite au salarié. (Art. L. 1235-1 du code
du travail)
* Caractère réel et sérieux du motif de licenciement
Ni la preuve du caractère réel et sérieux du motif de licenciement, ni la
preuve contraire n’incombent spécialement à l’une ou l’autre des
parties
* Faute grave ou lourde
Il incombe à l’employeur d’apporter la preuve de la faute grave ou
lourde qu’il invoque.
Principe : En matière prud’homale la preuve est libre
Production de documents par le salarié
Un salarié peut produire en justice des documents dont il a eu connaissance
à l’occasion de ses fonctions lorsque cela est strictement nécessaire à
l’exercice des droits de sa défense.
Il peut produire également les messages écrits (mails et SMS…) et audio
(répondeur…) à condition d’en être personnellement destinataire.
Loyauté dans l’obtention de la preuve et illicéité
L’enregistrement d’une conversation téléphonique effectué à l’insu de son
correspondant est illicite mais pas nécessairement irrecevable.
Illicéité de la preuve obtenue en violation du principe du secret des
correspondances.
Licéité de l’usage d’éléments issus des réseaux sociaux si ces derniers ont été
qualifiés de « publics » par leur auteur ou obtenus par l’entremise d’un
« contact » de l’utilisateur si cet élément est indispensable à l’exercice du
droit à la preuve et proportionnée au but poursuivi.
Pressions sur les salariés : se rend coupable du délit de subornation de
témoins l’employeur qui fait pression sur des salariés afin d’obtenir des
témoignages mensongers
Un dispositif de géolocalisation installé sur un véhicule professionnel ne doit
pas être utilisé pour localiser un salarié hors de son temps de travail
Dispositifs de contrôle et de surveillance (rappel des règles
applicables)
Tout dispositif mis en place dans l’entreprise doit respecter les
conditions suivantes :
– ne pas apporter de restriction aux droits et libertés des salariés qui ne
soit pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée
au but recherché (art. L 1121-1 code du travail)
– être porté à la connaissance des salariés préalablement à sa mise
œuvre (art. L 1222-4)
– être précédé de l’information et la consultation du CSE sur les
moyens et techniques permettant un contrôle de l’activité (L 2312-38)
– être conforme aux exigences de déclaration à la CNIL ou
d’autorisation préalable (vidéosurveillance) du code de la sécurité
intérieure
Evolutions jurisprudentielles récentes
La preuve jugée probante par le juge pénal s’impose au juge civil même
si le mode de preuve aurait été jugé illicite au plan civil (ex :
enregistrement vidéo obtenue de manière déloyale)
La production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle d’un
salarié peut en effet être jugée justifiée si elle est indispensable à
l’exercice du droit à la preuve et que l’atteinte est strictement
proportionnée au but poursuivi
Le juge doit apprécier si l’utilisation d’une telle preuve a porté atteinte
au caractère équitable de la procédure dans son ensemble en
mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle et le droit à
la preuve du salarié ou de l’employeur.
La faute du salarié doit ne pas pouvoir être prouvée par d’autres
moyens, le juge doit rechercher si l’employeur ou le salarié ne pouvait
pas atteindre un résultat identique en utilisant un moyen de preuve plus
respectueux de la vie personnelle des salariés.

Exemples
Arrêt 8 mars 2023 (cassation n°21-17.802) (vidéosurveillance des
locaux sans information ni déclaration CNIL),
« L’illicéité d’un moyen de preuve n’entraîne pas nécessairement son
rejet des débats ».
« En présence d’une preuve illicite, le juge doit d’abord s’interroger sur
la légitimité du contrôle opéré par l’employeur et vérifier s’il existait
des raisons concrètes qui justifiaient le recours à la surveillance et
l’ampleur de celle-ci. Il doit ensuite rechercher si l’employeur ne
pouvait pas atteindre un résultat identique en utilisant d’autres
moyens plus respectueux de la vie personnelle du salarié ».
(Ici rejet car l’employeur disposait d’un audit permettant de
« soupçonner » la salariée)
Arrêt du 19 avril 2023 (cassation n°21-20.308)
si le juge ne peut fonder sa décision uniquement ou de manière
déterminante sur des témoignages anonymes, il peut néanmoins
prendre en considération des témoignages anonymisés, c’est-à-
dire rendus anonymes a posteriori afin de protéger leurs
auteurs mais dont l’identité est néanmoins connue par l’employeur,
lorsque ceux-ci sont corroborés par d’autres éléments permettant d’en
analyser la crédibilité et la pertinence
Point de vigilance : si le mode de preuve originellement illicite peut
néanmoins, sous certaines conditions, être considéré comme « recevable »
il demeure susceptible de constituer une atteinte à la vie privée exposant
son auteur à des actions civiles ou pénales.

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