En matière de temps de travail, deux principes sont essentiels :
- la charge de travail assignée au salarié doit rester compatible avec son droit au repos ;
- en cas de litige sur le respect des temps de repos, c’est à l’employeur de démontrer que le salarié en a bien bénéficié.
Ces règles sont-elles applicables lorsque le salarié est en télétravail ? Oui, répond la Cour de cassation dans un important arrêt du 14 décembre 2022.
Suicide d’un salarié épuisé par le travail
Embauché comme ingénieur d’études puis promu chef de projet, un salarié se donne la mort sur le trajet entre son domicile et son lieu de travail. La veille, il avait confié son épuisement professionnel à son psychiatre.
Sa famille décide de saisir le conseil de prud’hommes pour obtenir réparation. Elle fait valoir que le salarié était soumis à une charge de travail trop lourde, le conduisant à travailler au-delà de l’amplitude légale de travail, en violation de son droit au repos quotidien. Un rapport de l’inspection du travail, remis au juge, confirme une amplitude journalière de travail considérable et quasi-permanente. Y sont consignés les premiers et derniers envois de mails par le salarié lorsqu’il était en télétravail, retraçant ainsi ses heures de début et de fin de travail sur une même journée.
Respect des temps de repos : la preuve par l’employeur
Le conseil de prud’hommes fait droit à la demande de la famille. Mais la cour d’appel donne gain de cause à l’employeur. Les juges admettent que le salarié travaillait « beaucoup » mais ils considèrent que son statut de télétravailleur (3 jours par semaine) lui permettait de s’organiser. Toujours selon la Cour d’appel, l’amplitude horaire relevée entre le premier et le dernier mail envoyés par le salarié ne démontre pas qu’il était en permanence à son poste de travail. Il y aurait donc insuffisance de preuve concernant le non-respect des temps de repos.
La Cour de cassation n’est pas de cet avis. Elle rappelle, dans son arrêt du 14 décembre, que la preuve du respect des temps de repos et des durées maximales de travail incombe exclusivement à l’employeur. Le fait que le salarié soit en télétravail ne modifie pas cette règle. C’est donc bien l’employeur qui devra étoffer son dossier, l’affaire étant renvoyée devant une autre cour d’appel chargée de la réexaminer.
A savoirLes règles de preuve sont différentes lorsque le salarié saisit les prud’hommes pour obtenir le paiement d’heures supplémentaires. Dans ce cas de figure, il partage la charge de la preuve avec l’employeur. Voir nos articles :Comment prouver les heures supplémentaires ?
Pour prouver vos heures supplémentaires, utilisez le référé probatoire
Durées maximales de travail et temps de repos
Le Code du travail fixe un certain nombre de seuils, mais attention, en fonction de la situation de l’entreprise, des dérogations peuvent être accordées.
- Le temps de travail quotidien ne doit pas dépasser 10 heures (art. L. 3121-18 trav.).
- Le temps de travail hebdomadaire ne doit pas dépasser 48 heures sur une même semaine et 44 heures par semaine en moyenne sur une période de 12 semaines consécutives (art. L.3121-22 trav.).
- Il est interdit de faire travailler un salarié plus de 6 jours par semaine ( L. 3132-1 C. trav.).
- Le repos quotidien est d’au moins 11 heures consécutives entre 2 journées de travail ( L. 3131-1 C. trav.).
- Le repos hebdomadaire est d’au moins 24 heures consécutives ; il s’ajoute à l’obligation de repos quotidien de 11 heures consécutives ( L. 3132-2 C. trav.), ce qui représente un repos hebdomadaire d’une durée minimale de 35 heures consécutives.
- Le salarié doit bénéficier d’un temps de pause d’au moins 20 minutes consécutives dès que le temps de travail quotidien atteint 6 heures ( L. 3121-16 C. trav.).
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