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L’employeur qui ne prend pas en compte la charge de travail de son salarié lors des entretiens annuels manque à son obligation de sécurité Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 13 avril 2023, 21-20.043, Inédit

L’employeur qui ne prend pas en compte la charge de travail de son salarié lors des entretiens annuels manque à son obligation de sécurité

Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 13 avril 2023, 21-20.043, Inédit

 

En termes de santé et de sécurité au travail, l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels, des actions d’information et de formation et la mise en place d’une organisation du travail et de moyens adaptés. Il veille également à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes (ici).

L’employeur met en œuvre ces mesures sur les fondements des principes généraux de prévention énumérés à l’article L. 4121-2 du Code du travail (ici).

La méconnaissance de ces dispositions peut engager la responsabilité pénale et civile de l’employeur.

En l’espèce, un salarié se plaignait de la charge de travail trop importante à laquelle il était soumis. De nombreux éléments abondaient dans son sens qu’ils n’hésitaient pas à exposer, sans succès, devant la Cour d’appel.

Ainsi, selon l’argumentation patronale, les nombreux mails lui demandant d’accomplir les tâches l’étaient dans des délais raisonnables et s’ils lui parvenaient à des horaires tardifs ou en fin de semaine cela correspondait aux horaires de sa supérieur hiérarchique et n’appelaient pas de réponse immédiate. En outre, pour ceux expédiés alors que le salarié se trouvait en congés payés, ce dernier bénéficiait de délai supplémentaire pour y répondre. De plus, des réponses n’étaient demandées dans des délais plus courts que lorsque le délai initial n’avait pas été respecté. Enfin, et à plusieurs reprises, sa responsable avait été sollicitée directement par d’autres personnes qui lui signalaient une urgence ou une absence de réponse du salarié.

S’agissant de son dossier médical, il témoignait du suivi du salarié et l’employeur n’était destinataire d’aucune communication particulière qui aurait pu lui permettre de détecter une souffrance au travail. Le seul certificat médical de son psychiatre, produit à l’audience et mentionnant un état préexistant du salarié, ne permet pas d’imputer au comportement de l’employeur l’état de santé de l’intéressé.

En conséquence les juges de la Cour d’appel de Paris retiennent que le rythme de travail important de l’intéressé n’est pas démontré par les éléments versés aux débats d’autant plus qu’à deux reprises, sa responsable lui a indiqué que, s’il n’était pas en mesure d’assurer certaines tâches, il devait le signaler, lui proposant expressément de l’aide pour son activité.

Mais la Cour de cassation ne l’entend pas de cette oreille.

En 2022, elle avait déjà jugé à propos d’un salarié en forfait jours qui s’était plaint des conséquences du sous-effectif chronique de son service que l’employeur ne justifiait « pas avoir pris les dispositions nécessaires de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail du salarié restaient raisonnables et assuraient une bonne répartition dans le temps du travail afin d’assurer la protection et la santé du salarié ».

Cour de cassation – Chambre sociale — 2 mars 2022 – n° 20-16.683

Dans l’arrêt commenté, la Cour pousse le bouchon encore plus loin. Elle considère  que « l’employeur ne justifiait pas avoir mis en œuvre des entretiens annuels au cours desquels étaient évoquées la charge de travail du salarié et son adéquation avec sa vie personnelle, le seul compte rendu d’entretien produit, en date du 26 avril 2013, dénommé « évaluation de la performance 2012 », ne contenant aucune mention relative à la charge de travail, ce dont il résultait que l’employeur avait manqué à son obligation de sécurité ».

Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 13 avril 2023, 21-20.043, Inédit

L’arrêt a donc été cassé et renvoyé devant une autre Cour d’appel afin de déterminer le préjudice subi par le salarié.

Pour conclure, les entretiens annuels sont un point d’appui pour aborder la question de la charge de travail. Il reviendra à l’employeur de démontrer avoir bien pris en compte  qu’elle est raisonnable en assurant une bonne répartition dans le temps de travail et ce aux fins de préserver la santé du salarié.

Dominique HOLLE

DLAJ CGT 63

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