Sommaire
Textes de référence
Attributions du CSE :
– Articles L. 2312-5 et -6 du code du travail
– Articles L. 2312-8 et -9 du code du travail
Principes de prévention :
– Article L. 4121-2 du code du travail
Rôle du CSE et de la CSSCT
Dans le cadre de ses missions en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail, le CSE, et la CSSCT si celle-ci existe et que ces prérogatives lui sont déléguées, peuvent proposer des mesures visant à prévenir le harcèlement moral.
Le CSE dans les entreprises d’au moins 50 salariés peut « susciter toute initiative qu’il estime utile et proposer notamment des actions de prévention du harcèlement moral, du harcèlement sexuel et des agissements sexistes » conformément au 3° de l’article L. 2312-9 du code du travail.
Si l’employeur refuse les mesures proposées, comme celles qui sont indiquées ci-dessous, l’employeur devra motiver son refus.
- Dédier une partie du règlement intérieur de l’entreprise à ces questions, cette partie contenant les définitions des actes répréhensibles, les sanctions encourues et la politique de l’entreprise en matière de lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Ce règlement étant remis à chaque salarié au jour de l’embauche. Cette partie est obligatoire dans les entreprises de 20 salariés et plus.
- Mettre en place un référent identifié parmi les représentants du personnel qui bénéficiera de deux jours de formation sur l’accompagnement des victimes de violences.
- Faire bénéficier aux membres du CSE d’une formation spécifique d’une journée, en plus de la formation de cinq jours, sur ces questions. Les salariés du service RH peuvent également en bénéficier.
- Organiser une heure de sensibilisation sur les violences en présence de l’ensemble du personnel.
- Mettre en place et afficher une procédure type en cas de violences, comprenant la procédure d’accueil des victimes et de signalement des auteurs.
- L’entreprise veillera à ce que l’environnement de travail soit non-sexiste (suppression des images portant atteinte à l’intégrité des personnes, existence de sanitaires et vestiaires garantissant la dignité des personnes, condamnation des propos et des « blagues » sexistes).
- Pour protéger les victimes de violences durant les trajets, un forfait spécifique peut être débloqué pour rembourser les taxis ou permettre les trajets en voiture afin d’éviter les transports en commun.
- Construire un indicateur sur le nombre de salariés ayant signalé des violences afin de suivre les évolutions et prendre des mesures appropriées.
Ces risques doivent être intégrés dans le Document Unique d’Evaluation des Risques. L’évaluation des risques de harcèlement peut se faire au moyen de plusieurs indicateurs :
- Existe-t-il un précédent nécessitant une vigilance accrue ?
- Existe-t-il des situations de travailleurs isolés et/ou en situation de vulnérabilité (jeunes, intérimaires, contrats courts, etc.) ?
- Les rapports sociaux dans l’entreprise sont-ils très hiérarchisés ? Des rapports très hiérarchisés et à l’inverse une absence de formalisation de la hiérarchie sont portent ce genre de risques.
- Quelle est la fréquence et la nature des contacts avec le public ? Les salariés en contact avec du public, comme des caissières, sont plus exposés à des risques de harcèlement.
- Quelle est la composition des équipes ? Une faible mixité peut générer des risques accrus.
- Les salariés peuvent-ils facilement faire remonter des difficultés relationnelles dans l’entreprise ?
Pour établir l’indicateur, on sélectionnera des critères soit parmi ceux proposés soit en en prenant d’autre. On établira alors un quotient ou une échelle de notation pour identifier les problèmes les plus urgents à résoudre et le niveau de risque. On peut également établir des pondérations entre critères selon qu’ils nous paraissent plus ou moins importants.
Exemple avec deux critères d’évaluation :
Evaluation du risque harcèlement : critères | Référence | Quotient
2017 |
Quotient
2018 |
Antécédents (gravité) |
Aucun | 1 | 1 |
Oui, sans ITT | 2 | 2* | |
Oui, avec ITT | 3* | 3 | |
Oui, avec décès | 4 | 4 | |
Signalements (quantité) |
Aucun | 1 | 1 |
Moins de 5 par an | 2 | 2* | |
Entre 5 et 10 par an | 3 | 3 | |
Plus de 10 par an | 4* | 4 | |
Moyenne
* En gras sont indiqués des notes qui servent d’exemple pour calculer une évaluation et son évolution. |
3.5 |
2.5 |
Attention, bien que l’évolution du quotient montre une amélioration, il faut toujours s’interroger sur les raisons de cette évolution. Par exemple sur les signalements, si un manager problématique a été licencié ou si l’intranet a été en panne pendant 6 mois, ne permettant plus de faire de signalement, les données ne s’analysent pas de la même manière.
La prévention quant à elle doit se baser sur les 9 principes de prévention énoncés à l’article L. 4121-2 du Code du travail :
- Eviter le risque (supprimer le risque ou mettre fin à l’exposition au risque) ;
- Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités (le harcèlement ne peut pas ne pas être évité) ;
- Combattre les risques à la source (en cas de harcèlement moral de la part d’un manager, outre sa responsabilité, il faut questionner l’organisation du travail) ;
- Adapter le travail à l’homme et à la femme ;
- Tenir compte de l’état d’évolution de la technique ;
- Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n’est pas dangereux ou par ce qui l’est moins ;
- Planifier la prévention en y intégrant l’organisation du travail, les conditions de travail et l’influence des facteurs ambiants, notamment en matière de harcèlement et d’agissements sexistes ;
- Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur des mesures de protection individuelle (formation des managers pour qu’ils n’adoptent pas de pratiques susceptibles de constituer du harcèlement et pour pouvoir identifier les comportements et les signaux révélateurs de situation de harcèlement afin de pouvoir intervenir par exemple) ;
- Donner les instructions appropriées aux travailleurs.
Dans cette prévention, l’information des salariés est essentielle pour que les potentiels harceleurs sachent que leurs comportements sont sanctionnables et que les potentielles victimes identifient les gestes et propos sanctionnables ainsi que les procédures accessibles. Chacun devant prendre conscience que certains gestes et certaines paroles n’ont pas lieu d’être, que les potentiels auteurs comprennent leur gravité et cessent de les avoir ou ne commencent pas, et que les potentielles victimes sachent qu’elles bénéficient de protection face à ces atteintes.
La sensibilisation des salariés passe donc par l’identification de situations concrètes de harcèlement et d’agissements sexistes, l’information sur les modalités de signalement dans l’entreprise, la communication des coordonnées des personnes ressources dans et hors de l’entreprise (services RH, services de santé au travail, inspection du travail, associations d’aide aux victimes, etc.), information sur le régime juridique et la protection des témoins et victimes, les sanctions dont sont passibles les auteurs et les dispositifs d’accompagnement mis en place par l’entreprise.
En ce qui concerne le harcèlement moral, il tient notamment à l’organisation du travail. Au-delà de personne du manager qui met la pression, une mauvaise organisation du travail peut susciter des comportements de harcèlement quelques soient les bonnes ou mauvaises intentions du manager. Cela passe par la formation des managers, une réflexion sur l’organisation du travail et ses effets (objectifs réalisables ou non, conditions de production, stress, etc.), sur la capacité de la direction à gérer des conflits, sur la politique managériale de l’entreprise. On sort ainsi de l’écueil selon lequel il suffirait de remplacer un mauvais manager sans rien changer au problème fondamental : l’organisation du travail.
Il faut également rejeter l’idée que la révélation de risques psychosociaux serait liée à l’inadaptation des salariés à une situation de travail stressante et qu’il suffirait de l’accompagnement d’un psychologue du travail pour y remédier. Une situation de stress au travail n’est pas normale et conformément aux principes de prévention, c’est le travail qui doit s’adapter à l’être humain et non l’inverse.
Le CSE dispose également de conseils et de soutiens dans ces missions. Il s’agit en particulier de l’inspection du travail, de la médecine du travail, de la CARSAT, de l’ARACT et pour les TPE et PME des CPRI.
Mettre en œuvre une démarche syndicale sur la prévention du harcèlement
La prévention de ce risque peut se construire avec les salariés, dans une démarche de recherche-action et en appliquant la démarche CGT. Cela permet en outre de donner une visibilité à la CGT et de lier son action à celle du CSE.
Etape 1 : Observer et consulter
Pendant une première période, les élus et syndiqués peuvent observer les situations de travail autour d’eux ou utiliser leurs heures de délégation pour observer puis discuter avec les salariés. Cette phase devant permettre d’identifier les facteurs de risques pouvant mener à des situations de harcèlement (ambiance dans l’atelier, organisation du travail, cadence et façon de travailler pour réaliser les objectifs, comportements des supérieurs, etc.). C’est également l’occasion de consulter les salariés, soit avec un questionnaire anonymisé soit dans une discussion plus libre pour connaître leur ressenti et leurs propositions.
Etape 2 : Construire les revendications et un plan d’action
Sur la base des observations et des consultations réalisées, les élus avec leur syndicat peuvent élaborer des propositions et un plan d’action contre le harcèlement moral. Il s’agira ensuite de consulter les salariés sur ces propositions et de les développer avec eux.
Etape 3 : Unir autour de ce plan
Il est possible ensuite d’informer les salariés sur ce plan d’action et de chercher à les mobiliser autour de cette question, par exemple par une pétition ou toute autre forme d’action. Il est également souhaitable de réaliser une unité avec les autres organisations et les élus sans étiquette autour de ces propositions élaborées conjointement avec les salariés. Les élus du CSE peuvent par ailleurs organiser une heure de débat d’actualité pour aborder cette question.
Etape 4 : Proposer le plan d’action
Il s’agira ensuite d’inscrire la discussion autour de ce plan lors d’une réunion du CSE ou de le proposer lors d’une réunion dédiée aux questions de santé, de sécurité et des conditions de travail. Il ne faut pas oublier que les propositions faites par la délégation du personnel au CSE visant à lutter contre le harcèlement doivent être discutées et que le refus de l’employeur de les mettre en place doit être motivé.
Etape 5 : Consulter et informer les salariés
Il faut ensuite informer les salariés des suites données à ce plan et des réponses de l’employeur. Si des mesures sont mises en place, il faudra ensuite les évaluer et recommencer le processus si les résultats ne sont pas satisfaisants. Si l’employeur refuse le plan, il s’agira alors d’amplifier la mobilisation des salariés pour le faire adopter, voire de mener une action en justice.
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