Un contenu publié dans le cadre des mallettes ordonnances – publié par la CGT en février 2018
Ordonnances Macron, la CGT n’en a pas fini !
Même si elles sont la première étape d’un vaste chantier de détricotage de notre modèle social qu’ambitionne le gouvernement sous la conduite du président de la République. Même si elles sont aujourd’hui publiées, ratifiées et que tous les décrets d’application sont parus au 31 décembre, la CGT n’a de cesse de combattre les ordonnances Macron.
Cette déstructuration d’ampleur appelle à une riposte continue et à des alternatives. Nous appelons ainsi à un processus de mobilisation et de luttes portant sur l’ensemble des réformes (voulues par le patronat et le gouvernement) qui remettent en cause notre modèle social.
La CGT se donne pour objectif de construire et partager un Code du travail du XXIe siècle pour un nouveau statut du travail salarié. Ces ordonnances sont à l’origine de graves régressions sociales. Elles sont porteuses de flexibilisation et de précarité pour les sala- riés, d’affaiblissement du syndicalisme et de possibles pertes de droits en termes d’activité syndicale. Elles ne reviennent pas seule- ment sur des droits durement acquis dans le temps par les luttes, elles creusent également des inégalités déjà trop importantes. C’est pourquoi tous les moyens de s’y opposer doivent être mis en œuvre. Qu’il s’agisse de se mobiliser dans la rue, comme nous l’avons fait et continuons à le faire dans les manifestations interprofessionnelles et professionnelles, devant les tribunaux, ou encore dans l’entreprise.
Ainsi, durant le mois d’octobre, la CGT a déposé trois recours contre les ordonnances Macron pour contester les dispositions qui portent le plus gravement atteinte aux libertés et droits fondamentaux des travailleurs, telles que celles relatives à la fusion des instances représentatives du personnel, aux licenciements et à leur facilitation ou encore se rapportant, dans la continuité de la loi El Khomri, à l’inversion de la hiérarchie des normes, avec la primauté donnée à l’accord d’entreprise sur la loi et la négociation de branche.
Ces recours continuent à être instruits par la justice et donneront lieu à des saisines complémentaires. Ils viennent aussi étayer la plainte en cours devant l’Organisation internationale du travail, engagée contre la précédente Loi Travail d’août 2016 qui en a ouvert la voie.
Comme l’a dit Madame Pénicaud : « Tout est possible dans l’entreprise du moment qu’il y a un accord. »
Pour faire front contre cette déstructuration, dans le cadre du plan de travail confédéral acté par le CCN et la CEC, un groupe de travail a également été mis en place sur le suivi des ordonnances « Macron », et sur le combat des salariés et militants dans l’entreprise.
Combattre les ordonnances, c’est obtenir que l’accord de branche donne le maximum de droits aux salariés, notamment en termes de définition de la rémunération de base intégrant de fait les diverses primes, comme l’ont obtenu, avec leurs organisations syndicales, les salariés du portuaire ou ceux du transport.
Mais c’est aussi contourner leurs incidences au niveau de l’entreprise.
Tel est l’objectif de ce guide, que nous mettons à votre disposition. Il sera essentiellement axé sur des stratégies syndicales pour peser de manière offensive sur la mise en place des CSE : gagner le maintien de représentants du personnel de proximité, une véritable prise en compte des questions d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail, des droits syndicaux confortés… En appui, des fiches synthétiques sont également produites sur les représentants de proximité, le comité social et économique, et d’autres revendications de la CGT. Elles complètent les différents supports et les nombreuses fiches argumentaires produits lors de la phase d’adoption et d’élaboration des ordonnances, qui sont toujours d’actualité.
Ce guide sert de socle à un module de formation confédérale pour décliner des journées d’études sur le sujet.
Il s’agit aussi d’éviter l’écueil institutionnel en réaffirmant la démarche CGT d’une action syndicale tournée vers les sala- riés, avec des IRP de proximité, porteurs de propositions et de revendications.
Il s’agit également d’outiller les élus et mandatés et plus largement les syndiqués et militants pour aborder notamment les négociations des protocoles électoraux de manière offensive.
Des batailles sont déjà engagées dans des syndicats, des branches, des professions ou autres, avec d’importantes conquêtes. Des initiatives ont également été prises dans de nombreux endroits. Nous vous invitons à faire connaître initiatives et succès, afin que toute la CGT puisse s’y appuyer.
Le combat continue !
Deux voire trois types d’accords collectifs vont régir la mise en place, l’élection et le fonctionnement du comité social et économique : le protocole d’accord préélectoral (PAP), l’accord collectif portant sur la mise en place du CSE (notamment découpage de l’entreprise en établissements distincts) et l’accord collectif portant sur le fonctionnement du CSE.
Chacun de ces accords répond à des règles de validité différentes et, en leur sein, certains sujets répondent encore à des règles de validité particulières, ce qui en fait un véritable imbroglio.
1- LA VALIDITÉ DE L’ACCORD PRÉÉLECTORAL EST SUBORDONNÉE À UNE DOUBLE CONDITION DE MAJORITÉ :
- il doit être signé par la majorité des organisations syndicales ayant participé à sa négociation, c’est-à-dire par les organisations syndicales intéressées ;
- parmi ces organisations signataires, il doit y avoir les organisations syndicales représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles ou, lorsque ces résultats ne sont pas disponibles, la majorité des organisations représentatives dans l’entreprise.
Le PAP regroupe :
- la durée du cycle électoral (compris entre deux et quatre ans, L. 2314-6) ;
- la répartition du personnel et des sièges dans les collèges ;
- le nombre et la composition des collèges ;
- la répartition des sièges au CSE central entre établissements et collèges ;
- les modalités du vote électronique ;
- les modalités pratiques des élections (lieu, date, heure, moyens, ) ;
- la limitation du nombre de mandats ;
- la modification du nombre de sièges et du nombre d’heures de délégation…
2. L’ACCORD COLLECTIF PORTANT SUR LE FONCTIONNEMENT DU CSE EST SOUMIS AUX RÈGLES DE VALIDITÉ SUIVANTES :
À compter du 1er mai 2018 :
- l’accord devra être signé par les syndicats représentatifs ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires du comité social et économique (L. 2232-12) ;
- l’accord pourra aussi être validé s’il est signé par un ou des syndicats représentatifs ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur des organisations représentatives au premier tour des dernières élections professionnelles, et validé par les salariés (référendum) ;
- l’accord peut également être signé par des voix alternatives si les conditions sont remplies (élu mandaté, ) ;
- on y retrouvera la rémunération du temps passé en réunion, l’assiette de calcul des budgets du CSE, la possibilité pour le suppléant d’assister aux réunions du CSE…
PARTICULARITÉS :
- pour la création des commissions autres que la commission santé, sécurité et conditions de travail, il n’est pas possible de recourir au référendum (L. 2315-45) ;
- en ce qui concerne le contenu, la périodicité et les modalités des consultations récurrentes du CSE mentionnées à l’article
- 2312-17, la liste et le contenu des informations nécessaires à ces consultations, le nombre de réunions annuelles du comité, les niveaux auxquels les consultations sont conduites et, le cas échéant, leur articulation, ainsi que les délais mention- nés dans lesquels les avis du comité sont rendus, il n’est pas possible de recourir au référendum et, en l’absence de DS, c’est un accord entre l’employeur et le CSE qui peut les déter- miner (L. 2312-19) ;
- en ce qui concerne le nombre d’expertises dans le cadre des consultations récurrentes, si un accord collectif ne peut être conclu avec les organisations syndicales, ou en l’absence de DS dans l’entreprise, c’est un accord entre l’employeur et le CSE qui peut le déterminer (L. 2315-79).
Sur tous ces points, il semblerait que le recours à des modes alter- natifs de validation, tel qu’un accord signé avec des élus manda- tés, ne soit pas possible.
3. L’ACCORD COLLECTIF PORTANT SUR LE DÉCOUPAGE EN ÉTABLISSEMENT DISTINCT DU CSE EST SOUMIS AUX RÈGLES DE VALIDITÉ SUIVANTES :
Il répond aux mêmes règles de validation (voir ci-dessus) que l’ac- cord collectif portant sur le fonctionnement du CSE.
Cependant, les voies de validation alternatives ne semblent pas possibles (élus mandatés etc.).
Par ailleurs, il n’est pas possible de recourir au référendum, si seules 30 % des OS signent l’accord (valable à partir du 1er mai).
Enfin, si la négociation échoue, ou s’il n’y a pas de DS dans l’entre- prise, c’est un accord entre l’employeur et le CSE (s’il existe) qui établira ces règles.
En l’absence d’accord collectif avec les organisations syndicales ou le CSE, c’est l’employeur seul qui prendra les décisions. Attention, l’employeur devra toutefois obligatoirement avoir ouvert des négociations.
PARTICULARITÉ
En ce qui concerne les modalités de mise en place de la commis- sion santé, sécurité et conditions de travail, si aucun accord n’est trouvé, c’est le règlement intérieur du CSE qui en fixe les modali- tés (L. 2315-41).
CET ACCORD REGROUPE :
- le découpage des établissements distincts ;
- les modalités de mise en place de la commission santé, sécu- rité et conditions de travail ;
- la création de représentants de proximité ;
- les délais de consultation du CSE
4. L’ACCORD COLLECTIF PORTANT SUR LE NOMBRE DE MEMBRES DU CSE CENTRAL EST SOUMIS À LA RÈGLE DE L’UNANIMITÉ :
Le nombre de membres du CSE central peut être augmenté uniquement par accord unanime des organisations syndicales représentatives dans l’entreprise (R. 2316-1). Cela exclut tout autre type d’accord (avec le CSE, avec des élus mandatés, par référendum…).
5. DURÉE DES ACCORDS
Le protocole d’accord préélectoral n’est toujours valable que pour la durée du cycle électoral.
Le ou les accords portant sur les éléments autres que ceux inclus dans le protocole d’accord préélectoral peuvent être à durée indéterminée ou déterminée (par exemple sur la durée du cycle électoral).
Si l’accord nous est favorable, mieux vaut qu’il soit à durée indéterminée. Cependant, il est complexe pour les organisations syndicales de dénoncer un tel accord. Par ailleurs, le rapport de force dans l’entreprise en termes de représentativité de chaque syndicat peut évoluer suite aux résultats des élections. Suivant ce qui a été obtenu, il vaut donc parfois mieux obtenir un accord à durée déterminée.
CHRONOLOGIE DES ACCORDS ET ACCORDS « MIXTES »
Étant donné que l’accord portant sur le découpage en établissements distincts est un préalable nécessaire au protocole d’accord préélectoral, il doit être conclu en premier.
Les règles sur le fonctionnement du ou des CSE peuvent être conclues avant ou après les élections professionnelles. Ce choix est à faire en fonction de notre rapport de force actuel et escompté après les élections (notre représentativité et donc notre poids dans les négociations).
Peut-il y avoir des « accords mixtes », c’est-à-dire portant à la fois sur les thèmes relevant du protocole d’accord préélectoral, de l’accord découpant en établissements distincts, des thèmes concernant le fonctionnement du CSE et du nombre de membres du CSE central ? Tous ces thèmes relèvent de règles de validité différentes, comme nous l’avons vu.
Cependant, il semblerait que la Cour de cassation puisse accepter un tel accord mixte pourvu que les conditions de validité propre à chaque thème soient respectées (elle a déjà par exemple admis la création d’une UES par un PAP, alors qu’une UES doit normalement être créée par un accord de droit commun: Cass. soc. 14 novembre 2013, n° 14-12522).
Attention : tous les points négociables ne sont pas abordés dans ce guide, seuls ceux qui ont fait l’objet de modifications par les ordonnances Macron.
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