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Quelle représentation pour les coursiers et les livreurs ?

Le scrutin relatif à l’élection des représentants des travailleurs de plateforme numérique a été fixé par arrêté du 9 au 16 mai 2022. Nous vous proposons de revenir sur ce que l’on sait, pour le moment, de cette représentation dont le régime n’est pas encore tout à fait fixé.

 

Pour quoi vote-t-on ?

 

Le scrutin porte sur la désignation des organisations représentatives des travailleurs de plateforme. Ces organisations peuvent être des syndicats ou des associations dont l’objet est la représentation de ces travailleurs.

 

Les conditions à satisfaire pour prétendre à la représentativité sont similaires à celles des représentants des salariés. Les seules différences sont qu’il n’est exigé qu’une ancienneté d’un an de l’organisation et d’avoir recueilli 8 % dans le scrutin pour être représentative.

 

Il faut donc remplir les critères de respect des valeurs républicaines ; d’indépendance ; de transparence financière ; d’ancienneté minimale d’un an dans le champ professionnel des travailleurs recourant aux plateformes et au niveau national ; d’influence, prioritairement caractérisée par l’activité et l’expérience ; et d’effectifs d’adhérents et de cotisations suffisants.

 

Ces représentants bénéficient d’une protection contre la rupture du « contrat commercial » qui les lie aux plateformes et d’un droit à la « formation au dialogue social ».

 

Dans son régime juridique, la représentation des travailleurs de plateforme ressemble à s’y méprendre à celle des salariés. Le texte montre cependant toute la tension qu’il y a entre un régime proche de la représentation des salariés et la tentative de justifier que les travailleurs de plateforme ne sont pas des salariés. De ce point de vue, le régime d’autorisation de la rupture du « contrat commercial » pour protéger les représentants peine à masquer ce que l’on pourrait, comme l’a fait la Cour de cassation à plusieurs reprises, analyser comme un contrat de travail.

 

Il s’agit d’un scrutin sur sigle. L’audience de chaque organisation permettra de déterminer le nombre de représentants qu’elle peut désigner.

 

Pour l’heure, une seule instance dans laquelle siègeront des représentants des travailleurs de plateforme a été définie. Il s’agit du « conseil des acteurs des plateformes » qui sera placé auprès de l’Autorité centrale des relations sociales des plateformes d’emploi. Un arrêté doit encore déterminer le nombre de représentants en son sein. On attend notamment la définition de l’instance de représentation des travailleurs de plateforme par secteur et par plateforme.

 

Qui vote dans ce scrutin ?

 

Pour voter, il faut tout d’abord travailler pour le compte d’une plateforme de mise en relation. Deux secteurs sont concernés d’après l’article L. 7343-1 du code du travail :

  • les activités de conduite d’une voiture de transport avec chauffeur ;
  • les activités de livraison de marchandises au moyen d’un véhicule à deux ou trois roues, motorisé ou non.

 

Il faut donc travailler dans l’un de ces secteurs pour être concerné par le scrutin. Il faut également avoir une ancienneté minimale de 3 mois pour voter. Les modalités d’appréciation de cette ancienneté sont ainsi déterminées par l’article L. 7343-7 du code du travail :

 

« Cette condition s’apprécie au premier jour du quatrième mois précédant l’organisation du scrutin en totalisant, au cours de la période constituée des six mois précédents, les mois pendant lesquels ces travailleurs ont effectué au moins cinq prestations pour une plateforme. »

 

Il faut donc distinguer deux périodes. La première période est celle permettant d’établir les listes électorales. Elle concerne les 4 mois avant la date du scrutin. La seconde période est la période de référence pour calculer l’ancienneté. Cette période est de 6 mois avant le premier jour du quatrième précédant le scrutin. Soit du dixième au quatrième mois. C’est dans cette période de référence qu’il faut justifier trois mois d’ancienneté. Un mois d’ancienneté se justifie par la réalisation d’un moins 5 prestations.

 

Dans le premier cas, le travailleur a réalisé 5 prestations par mois sur trois mois différents au cours de la période de référence. Il justifie de trois mois d’ancienneté sur la période de référence, il est donc électeur. Dans le second cas, le travailleur a réalisé 10 prestations par mois sur deux mois différents sur la période de référence, il justifie de deux mois d’ancienneté, il n’est donc pas électeur.

 

Quelles sont les modalités du scrutin ?

 

Le scrutin se déroule par voie électronique.

 

Il aura lieu tous les quatre ans.

 

Les deux premiers scrutins soumis à des règles différentes

 

Le régime juridique de la représentation des travailleurs de plateforme ne brille pas par son intelligibilité. En témoigne de manière presque caricaturale les règles permettant de déterminer qui peut être électeur. Des fois que ces règles soient trop simples à comprendre, l’ordonnance n° 2021-484 du 21 avril 2021 prévoit des règles spécifiques aux premiers scrutins sans réellement justifier leur intérêt.

 

En ce qui concerne le premier mandat :

  • Celui-ci sera de deux ans au lieu de quatre pour les suivants ;
  • Le seuil d’audience pour être représentatif est abaissé à 5 % au lieu de 8 % pour les suivants.

 

En ce qui concerne les deux premiers mandats :

  • L’ancienneté minimale requise pour être représentatif est abaissée à 6 mois au lieu de un an pour les suivants ;
  • L’influence de l’organisation s’apprécie exclusivement au regard de son activité et non au regard de son activité et de son expérience.

 

En somme, tout est fait pour favoriser la représentativité d’autres organisations que celles qui sont déjà implantées et actives, notamment auprès des livreurs.

 

Pour aller plus loin :

 

Ordonnance n° 2021-484 du 21 avril 2021 relative aux modalités de représentation des travailleurs indépendants recourant pour leur activité aux plateformes et aux conditions d’exercice de cette représentation

 

Décret n° 2021-1461 du 8 novembre 2021 relatif à l’organisation et au fonctionnement de l’Autorité des relations sociales des plateformes d’emploi

 

Loi n° 2022-139 du 7 février 2022 ratifiant l’ordonnance n° 2021-484 du 21 avril 2021 relative aux modalités de représentation des travailleurs indépendants recourant pour leur activité aux plateformes et aux conditions d’exercice de cette représentation et portant habilitation du Gouvernement à compléter par ordonnance les règles organisant le dialogue social avec les plateformes

 

Décret n° 2022-142 du 7 février 2022 modificatif relatif à l’organisation et aux conditions de déroulement du scrutin destiné à mesurer l’audience des organisations de travailleurs des plateformes

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