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Rôle du CSE dans la crise sanitaire

Une obligation d’information et de consultation sur les mesures prises

 

L’article L. 2312-27 du code du travail impose la consultation des élus du CSE sur le plan de prévention des risques dans les entreprises d’au moins 50 salariés, donc sur sa modification face à un risque nouveau, et en cas :

  • De modifications importantes de l’organisation du travail ;
  • De recours à l’activité partielle ;
L’article R. 3243-1 du code du travail dans sa nouvelle rédaction issue du décret n° 2020-325 du 25 mars 2020, permet à l’employeur de disposer d’un délai de 2 mois à compter de la demande au préfet de recourir à l’activité partielle pour recueillir l’avis du CSE, en cas de sinistre ou d’intempéries à caractère exceptionnel ou pour toute autre circonstance à caractère exceptionnel autre que celles prévues à l’article R. 5122-1 du code du travail.
  • De dérogations aux règles relatives à la durée du travail et aux repos.
L’article 6 de l’ordonnance n° 2020-323 du 25 mars 2020 et l’article 7 de l’ordonnance n° 2020-389 du 1er avril 2020 précisent que lorsque l’employeur recours aux mesures dérogatoires en matière de durée maximale du travail (12 heures par jour et par nuit et 60 heures par semaine dans les secteurs d’activité particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de l’activité économique et sociale dont la liste doit encore être établie par décret) ; en matière de congés et de repos (à l’exception de l’imposition par l’employeur des congés payés qui doit être prévue par accord) ; ou du repos dominical, il doit informer sans délai et par tout moyen le CSE. Celui-ci dispose alors d’un mois pour rendre son avis.

 

L’employeur doit donc consulter le CSE sur le plan de continuation de l’activité pendant la crise sanitaire et sur les mesures de prévention à adopter. Cela peut donc comprendre :

  • La définition des postes indispensables à la continuation de l’activité ;
  • Le télétravail (Ressource Secafi sur le télétravail) ;
  • Des mesures permettant aux salariés la garde des enfants ;
  • Le chômage partiel et le maintien au domicile de salariés infectés ou fragiles ;
  • La mise en place des consignes de sécurité sanitaire dans l’entreprise (distance d’1 mètre entre chaque poste, protection contre les projections de gouttelettes comme une vitre ou une plaque de séparation entre les postes, fourniture de gants et de gel-hydroalcoolique, etc.)

 

En matière économique, l’entreprise pourra bénéficier d’aides, un fond de 300 milliards a été annoncé par le Président de la République, ou de délais de paiement envers certains débiteurs, comme pour les loyers, les crédits bancaires ou les cotisations sociales. Le CSE doit donc également être consulté sur cet aspect afin que la crise sanitaire ne mette pas en péril la poursuite de l’activité et les emplois (ressource Secafi sur les aides économiques).

 

Il est aussi possible d’envisager de recourir à la formation, ce qui permet durant cette période de mobiliser le compte de formation, notamment par le biais de conventions FNE-Formation. Cela permet aux salariés de suivre une formation durant cette période et d’acquérir une certification. Il faut cependant veiller à ce que les modalités pédagogiques soient compatibles avec les mesures de prévention (bilan de compétence ou rendez-vous par visioconférence, formation à distance, etc.).

 

En raison de l’urgence, l’employeur peut prendre des mesures conservatoires avant la consultation. Mais les représentants du personnel, en tant que salariés, sont les meilleurs spécialistes du travail réel dans l’entreprise et sont donc les meilleurs conseillers pour adapter cette activité dans la période.

 

Aménagement des délais en matière de consultation du CSE du 3 mai au 23 août

 

Du 3 mai au 23 août 2020 les délais de convocation et de consultation sont aménagés par différents textes : l’ordonnance n°2020-507 du 2 mai 2020, modifiant l’ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020, complétée les décrets n° 2020-508 et n° 2020-509  Nous reproduisons ci-dessous les nouveaux délais applicables au cours de cette période.

 

Il s’agit de la consultation sur les mesures prises pour faire face aux conséquences de l’épidémie, si la consultation porte sur un sujet qui n’est pas directement lié, il nous semble que les délais normaux doivent s’appliquer. Il demeure possible de revendiquer l’application des délais conventionnels lorsqu’un accord collectif prévoit des délais plus long. Cependant, l’employeur ne sera pas tenu de les respecter puisque les ordonnances neutralisent les délais conventionnels.

 

Délais de communication de l’ordre du jour

 

Envoi de l’ordre du jour avant la réunion… Article de référence Délai applicable du 3 mai au 23 août Délai normal
… du CSE Article L. 2315-30 du code du travail 2 jours calendaires 3 jours (ouvrables selon nous)
… du CSE central Article L. 2316-17 du code du travail 3 jours calendaires 8 jours (ouvrables selon nous)

 

Ces délais ne s’appliquent pas aux consultations du CSE dans le cadre du licenciement d’au moins 10 salariés sur une période de 30 jours (PSE) et d’un accord de performance collective prévu à l’article L. 2254-2 du code du travail.

 

Délais de consultation du CSE

 

Consultation… Article de référence Délai applicable du 3 mai au 23 août Délai normal
… sans expertise du CSE et du CSE-C Article R. 2312-6 du code du travail 8 jours 1 mois
… avec expertise du CSE Article R. 2312-6 du code du travail 11 jours 2 mois
… avec expertise du CSE-C Article R. 2312-6 du code du travail 12 jours 2 mois
… avec une ou plusieurs expertises dans le cadre de la consultation au niveau du comité central et d’un ou plusieurs comités d’établissement Article R. 2312-6 du code du travail 12 jours 3 mois
Délai de transmission des avis des comités d’établissement au comité central et date à laquelle il est réputé avoir été consulté et avoir rendu un avis négatif Article R. 2312-6 du code du travail 1 jour 7 jours

 

Ces délais ne s’appliquent pas aux consultations du CSE dans le cadre du licenciement d’au moins 10 salariés sur une période de 30 jours (PSE), d’un accord de performance collective prévu à l’article L. 2254-2 du code du travail et aux informations-consultations récurrentes prévues à l’article L. 2312-17 du code du travail sur les orientations stratégiques, la situation économique et financière ainsi que la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi.

 

Délais liés aux modalités de l’expertise

 

Modalité d’expertise Article de référence Délai  applicable du 3 mai au 23 août Délai normal
Demande d’information complémentaire de l’expert à l’employeur Article R. 2315-45 du code du travail 24 heures 3 jours
Réponse de l’employeur à l’expert Article R. 2315-45 du code du travail 24 heures 5 jours
Notification à l’employeur du coût, de l’étendue et des délais Article R. 2315-46 du code du travail 48 heures 10 jours
Saisine du juge prévue à l’article L. 2315-86 pour contester les modalités de l’expertise Article R. 2315-49 du code du travail 48 heures 10 jours
Délai minimal entre la remise du rapport par l’expert et l’expiration des délais de consultation du comité Article R. 2315-47 du code du travail 24 heures 15 jours

 

Ces délais ne s’appliquent pas aux consultations du CSE dans le cadre du licenciement d’au moins 10 salariés sur une période de 30 jours (PSE), d’un accord de performance collective prévu à l’article L. 2254-2 du code du travail et aux informations-consultations récurrentes prévues à l’article L. 2312-17 du code du travail sur les orientations stratégiques, la situation économique et financière ainsi que la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi.

 

Contenu du plan de prévention du risque

 

Le plan de prévention du risque peut tout d’abord contenir les consignes sanitaires et leur affichage afin de fournir aux salariés les moyens de lutter contre le risque de contagion. Cela comprend l’information et la fourniture du matériel nécessaire (mouchoirs, solutions hydroalcooliques, masques, etc.).

 

Le plan peut comporter un volet sur la mise en place du télétravail et l’aménagement du temps et des postes de travail pour limiter les risques de contagion, notamment liés aux contacts rapprochés et prolongés.

 

Identifier les moyens de transports des salariés pour réagir en cas de révélation du risque ou prévenir un risque lorsque les salariés utilisent les transports en commun.

 

Une restriction de l’accès à l’entreprise, notamment pour les clients et fournisseurs.

 

Une procédure en cas de révélation d’une contamination. Cette procédure pouvant contenir :

 

  • Le nettoyage des locaux de travail. Il est préconisé d’attendre 3 heures après la révélation du risque, c’est la durée de survie du virus sur les surfaces sèches. Le nettoyage se fait ensuite en fournissant des blouses à usage unique et des gants de nettoyage (le port d’un masque n’est pas utile) et en privilégiant une stratégie de lavage-désinfection humide (nettoyer les sols et surfaces avec un bandeau à usage unique imprégné d’un produit détergent, rincer à l’eau avec un autre bandeau, laisser sécher et désinfecter avec un autre bandeau de lavage imprégné d’eau de javel diluée) ;

 

  • La mise en isolement pendant 14 jours des salariés ayant été au contact du ou des salariés infectés, celle-ci peut être prescrite par l’Agence régionale de santé (ARS), qui fournira les arrêts de travail nécessaires.

 

Si l’employeur n’agit pas

 

Si l’employeur ne prend aucune initiative en ce sens, l’article L. 2315-27 du code du travail permet à deux membres du comité, par une demande motivée, de provoquer une réunion extraordinaire du CSE sur ce sujet afin de demander la mise en œuvre de mesures de prévention.

Si l’employeur n’organise pas cette réunion, le CSE, cette fois-ci à la majorité de ses membres, peut demander à l’inspection du travail de convoquer la réunion qui se fera sous la présidence de l’agent de contrôle.

 

Si un risque se révèle, un membre du CSE peut aussi utiliser le droit d’alerte afin d’obliger l’employeur à mener une enquête avec lui et à prendre des mesures de prévention aux termes de l’article L. 2312-60 du code du travail.

Le représentant du personnel alerte l’employeur et consigne son avis par écrit dans un registre spécial indiquant d’après aux articles D. 4132-1 et 2 du code du travail :

  • Les postes de travail concernés par la cause du danger constaté ;
  • La nature et la cause du danger ;
  • Le nom des travailleurs exposés.

 

L’employeur procède sans délai à une enquête avec le représentant du personnel. En cas de divergence sur la réalité du danger ou la façon de le faire cesser, le CSE est réuni dans les 24 heures et l’inspection du travail et la caisse régionale d’assurance maladie sont informées par l’employeur.

 

A défaut d’accord entre l’employeur et la majorité des membres du CSE sur les mesures à prendre et les conditions d’exécution, l’inspecteur du travail est saisi immédiatement. Si cette faculté n’est pas expressément citée par les textes sur le droit d’alerte, il nous semble qu’un membre du CSE peut également saisir l’inspection du travail.

 

 

2 réactions :

  1. Merci pour cette réponse Dorian.
    L’employeur s’est ravisé pour l’instant et à décaler un retour en présentiel au 4 Mai.

    J’ai eu un nouveau retour de l’inspecton du travail :
    – Votre employeur souhaite mettre fin au télétravail instauré depuis le début du confinement en se fondant notamment sur les risques psycho-sociaux générés par l’isolement.
    Conformément aux articles L.4121-3 et R.4121-2 code du travail, l’employeur doit procéder à l’évaluation des risques professionnels, cette évaluation devant être renouvelée en raison de l’épidémie de COVID19. Il serait donc opportun que vous puissiez consulter le document unique d’évaluation des risques mis à jour par votre employeur et sur lequel il se fonde pour demander le retour en présentiel des salariés de l’entreprise. Vous pourrez dés lors vérifier si cette évaluation des risques et les mesures envisagées garantissent le respect des règles de prévention (dont les gestes barrières).
    De plus, votre employeur met en avant les risques psycho-sociaux qui résulteraient du télétravail puisque des personnes se retrouveraient en situation d’isolement. Si votre employeur détient des éléments de diagnostic lui faisant penser que des risques psycho-sociaux existent réellement, ces éléments doivent être portés à la connaissance des membres du CSE.

    – L’article L.4121-2 du code du travail dresse une hiérarchie des principes généraux de prévention sur lesquels l’employeur doit se fonder. Le télétravail, qui est en place depuis le début du confinement, semble être une mesure pertinente au regard de ces principes généraux de prévention. Le fait que votre employeur veuille arrêter ce dispositif pour instaurer le retour des salariés dans les locaux paraît être une mesure moins cohérente en matière de prévention des risques puisqu’elle reposerait a priori seulement sur le respect des gestes barrières.

    – Dans les mesures que votre employeur semble vouloir mettre en place pour permettre le retour en présentiel, il évoque la condamnation du réfectoire. Or, cette mesure ne respecte pas la règlementation en vigueur puisque ce local doit être laissé à disposition des travailleurs. En outre, l’article R.4228-19 du code du travail dispose qu’ «Il est interdit de laisser les travailleurs prendre leur repas dans les locaux affectés au travail». Les mesures mises en place par l’employeur pour limiter les risques de propagation du virus ne doivent pas porter atteinte aux dispositions du code du travail.

    – Je vous rappelle que le télétravail peut être demandé par les salariés auprès de l’employeur. Si ce dernier refuse, il doit motiver sa décision (article L.1222-9 du code du travail).

    – Vous m’avez indiqué que votre employeur est revenu en partie sur sa décision en repoussant le retour en présentiel à la première semaine du mois de mai. Si sa décision de mettre fin au télétravail d’ici ce délai est maintenue et que vous constatez, une fois de retour dans les locaux, que les mesures de prévention ne sont pas respectées et qu’il existe une cause de danger grave et imminent, le représentant du personnel au CSE doit alerter l’employeur (article L.4131-2 du code du travail).
    Le membre du CSE doit consigner son avis par écrit (article L.4132-2 du code du travail), dans le cas d’espèce en détaillant les risques de contaminations auxquels les salariés sont exposés du fait de leur retour en présentiel dans l’entreprise. L’employeur est alors tenu de réagir à cette alerte en réalisant une enquête conjointe avec le membre du CSE qui a exercé le droit d’alerte et en prenant les mesures nécessaires pour remédier au danger. S’il y a divergence de point de vue sur la réalité du danger ou la façon de le faire cesser, le CSE est réuni d’urgence dans un délai n’excédant pas 24H et l’employeur doit informer immédiatement l’inspecteur du travail et l’agent du service de prévention de la CARSAT (article L.4132-3 du code du travail). Enfin, à défaut d’accord entre l’employeur et la majorité du CSE sur les mesures à prendre et leurs conditions d’exécution, l’inspecteur du travail est saisi immédiatement par l’employeur (article L.4132-4 du code du travail).

    – Enfin, il est rappelé sur le site internet du Ministère du Travail que “Suite au passage au stade 3 de l’épidémie, le télétravail devient la norme pour tous les postes qui le permettent. Si votre activité ne le permet pas, vous devez alors garantir la sécurité de vos salariés en repensant l’organisation du travail”, “Depuis le passage au stade 3 de l’épidémie, la mise en œuvre du télétravail doit être impérative dès lors que le poste de travail le permet”.

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